Chers internautes,
Cette année, la
Saint-Pierre n’aura pas lieu à cause de la pandémie. Gruissan d’Autrefois tient
à évoquer cette fête si chère au cœur des Gruissanais en relatant un article
paru en juillet 1990 où
Marie-Rose Taussac évoquait la Saint Pierre au
19ème siècle :
Pendant de longues
années, l’offrande à Saint Pierre en musique fut interdite dans l’église,
l’orgue seul était toléré.
En avril 1855, les
Patrons de la Prud’homie demandent au curé, l’Abbé Reul de les autoriser à
faire l’offrande selon « l’ancien usage » avec « la musique des
pêcheurs ». Cette demande avait été faite et refusée en 1854 et quelques
années avant. L’abbé Reul bien qu’il lui fut assuré que « l’ordre ne sera
point troublé » conseille de demander cette autorisation à Monseigneur
l’Évêque par l’intermédiaire du Commissaire de la Marine. Les Prud’hommes
écrivent donc une belle lettre en juin 1855 dont la copie dans le registre de
la Prud’homie est illustrée par un dessin d’un petit bateau avec voiles et mâts
sur une hampe. C’est la maquette qui sert toujours à l’offrande.
Cette lettre se
termine par la phrase suivante : « En conséquence, nous vous
supplions , Mr le Commissaire de vouloir bien être notre interprète, auprès de
sa grandeur, nous avons la douce persuasion que vous nous connaissez assez pour
lui garantir que l’ordre ne sera point troublé et la même assurance pourrait, au besoin, lui être donnée par notre
pasteur, ainsi que par l’autorité locale. »
Cette lettre est
émouvante par le regret attristé qu’elle traduit. Elle nous aide à comprendre
ce respect d’une longue tradition, si vivace encore de nos jours et la
persévérance de ces hommes qui, à trois reprises, malgré deux refus
consécutifs, n’ont pas hésité à renouveler leur demande qu’ils formuleront
encore dix ans plus tard.
C’est la confirmation
qu’au 19ème siècle, le respect de l’église, de la hiérarchie, le respect
réciproque entre les pêcheurs et leur curé, des lois morales, des lois civiques
était ancré dans les âmes.
Nous n’avons pas la
réponse à cette belle lettre qui fut certainement négative puisque en avril
1865 cette demande est renouvelée à l’Abbé Reul par le secrétaire de la
Prud’homie, Henri Pesqui. A nouveau les Prud’hommes sont renvoyés à l’Évêque.
Celui-ci par l’intermédiaire du Commissaire de la Marine leur refuse
l’autorisation de remplacer l’orgue par la fanfare.
Ce Commissaire Mr
Chanson, infatué de sa personne et de sa fonction, méprisant écrit :
« Quant aux musiques de village, dites de bal, elles sont interdites
partout. Puisque nos marins se sont passé d’une semblable musique jusqu’à ce
jour, ils s’en passeront bien encore, sans éprouver une grande peine... ».
Mais pour qui Mr
Chanson prend-il les pêcheurs ?
Peut-il juger de la
peine des marins ?
Il n’a pas compris
que s’ils veulent jouer leur musique, celle à laquelle ils participent, c’est
pour donner à Saint Pierre la ferveur qui est en eux.
Ce Monsieur n’a pas
l’intelligence du cœur !
D’une affaire de
cœur, il fait une affaire administrative.
Il n’a rien compris.
Paix à son âme.
Les temps ont changé,
les mentalités aussi.
De nos jours, la
belle musique du village retentit dans notre vieille église. Des pêcheurs font
partie de l’orchestre. Les pêcheurs et leur famille font l’offrande en dansant
le pas rituel appris de leurs ancêtres. Ils tiennent d’une main un grand cierge
allumé de l’autre la petite barque aux voiles roussies par le temps dessinée en
1855 dans le registre de la Prud’homie.
Marie-France Hurtado,
Présidente.
D'après le récit de Marie-Rose TAUSSAC
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